Problématique majeure de la prévention des risques psychosociaux en entreprise, le harcèlement sexuel au travail concernerait 0,7% des salariés chaque année, avec une forte prévalence de femmes chez les victimes (source : étude 2020 de la DARES).
Bien qu’entrant dans le cadre des obligations de l’employeur de protéger la santé et la sécurité de ses équipes, le harcèlement sexuel reste parfois difficile à identifier et donc, à empêcher. Pour mener des actions préventives efficaces, le personnel doit être formé aux risques psychosociaux, et au harcèlement sexuel en particulier, à travers des formations RPS agréées.
Harcèlement sexuel : définition
Si le droit français les distinguent, les agressions sexistes, l’agressions sexuelles et le harcèlement sexuel restent cependant très fortement liés par le contexte. Une agression sexiste peut en effet s’apparenter à du harcèlement sexuel, lequel peut avoir pour conséquence ultime une agression sexuelle. Toutes ces situations peuvent exister dans un autre contexte que celui du travail.
Les grands types de harcèlement sexuel
Le harcèlement sexuel est caractérisé par sa connotation sexuelle ou sexiste, impliquant un rapport de domination fondé sur les rapports sociaux de sexe et n’ayant pas nécessairement de lien avec le travail.
On distingue 2 grands types de harcèlement sexuel :
- des agissements sexistes ou sexuels répétés qui portent atteinte à la dignité de la personne ou qui crée une situation hostile, intimidante ou offensante
- des pressions graves pour obtenir un acte de nature sexuelle
En aucun cas le harcèlement sexuel ne doit être confondu avec la séduction, laquelle suppose le libre consentement et la réciprocité du désir entre les adultes concernés.
Exemple d’agissements assimilés à du harcèlement sexuel au travail
On catégorise ces agissements en 3 types, selon leur degré de visibilité, d’intentionnalité et s’ils sont plus ou moins explicites. Toutefois, dès lors qu’ils sont répétés, ces agissements sont considérés comme du harcèlement sexuel.
Les agissements sexistes
- hostiles, qu’on qualifie de machistes et misogynes
“Les réunions s’éternisent dès qu’il y a des femmes, elles sont tellement bavardes !”
“Tu es enceinte ? Tu peux dire adieu à ta carrière !”
“T’es sûre que tu n’as pas été recrutée pour faire le ménage ?”
- subtils, souvent sous couvert d’humour
“Tu es sûre que tu veux ouvrir ce carton ? Il ne faudrait pas que tu te casses un ongle…”
“Ah, les hommes, incapables de faire 2 choses en même temps !”
- ambivalents voire bienveillants
“C’est un vrai mec celle-là, elle n’a aucune sensibilité.”
“Tu nous prépares un petit café, Marie ? Tu le fais si bien…”
Les agissements à connotation sexuelle
Ces agissements ne sont pas spécifiques à l’environnement professionnel :
- prendre une pose suggestive
- envoyer des images pornographiques
- formuler des remarques sur la tenue ou le physique (“Cette chemise met bien en valeur ta poitrine, c’est appréciable”.)
- solliciter un rapport sexuel de manière explicite
- envoyer des propositions sexuelles répétées, sans tenir compte du refus de l’autre personne
Les facteurs de risques principaux du harcèlement sexuel au travail
Dans le monde de l’entreprise, les facteurs de risques du harcèlement sexuel sont multiformes.
Le management et la culture de l’entreprise
Les facteurs organisationnels et managériaux ont la part belle dans l’expression du harcèlement sexuel au travail :
- Les structures très hiérarchisées qui installent des rapports de domination malsains ;
- Certains modes de management qui favorisent la concurrence sauvage entre salariés ;
- Les entreprises qui véhiculent une culture patriarcales, machistes ou viriles ;
- Les employeurs qui n’apportent pas de réponse sévère face aux agissements sexistes ou sexuels.
La faible mixité sexuelle
Dans les secteurs et métiers où il y a une forte disparité entre le nombre de femmes et d’hommes, les faits de harcèlement sexuel rapportés sont plus nombreux. Il arrive aussi que les salarié.e.s soient victimes de ce type d’agissements de la part des usagers de leur service (clients, fournisseurs, partenaires…).
Le profil précaire des salariés
Les salariés sous-payés, en contrat court, les mères isolées, les personnes d’origine étrangère ou les personnes porteuses de handicap – notamment mental – sont des proies “faciles” pour les harceleurs sexuels.
Les conséquences sur le salarié harcelé sexuellement
Les conséquences du harcèlement sexuel au travail et dans tout autre contexte peuvent être dramatiques sur les salarié.e.s qui en sont victimes et, par rebond, pour l’entreprise elle-même.
Les conséquences sur la santé
On répertorie de nombreux troubles, symptômes et maladies chez les victimes de harcèlement sexuel. Ils peuvent être d’ordre physique (cervicalgies, troubles musculosquelettiques, coliques, maux de tête, troubles de l’appétit, du sommeil, crise de panique, crise d’angoisse, sueurs) et/ou d’ordre psychique (dépressions nerveuses, détresse psychologiques, stress chronique, suicide).
A terme, l’impact sur la vie de la victime est immense : perte d’estime de soi, insatisfaction générale, perte de revenus avec arrêt de la carrière…
Les conséquences sur l’entreprise
L’entreprise subit aussi les conséquences du harcèlement sexuel sur ses salarié.e.s. Elle rencontre un fort taux de démission (turnover), une perte de compétences internes (salariés moins engagés dans leur travail, taux d’absentéisme élevé), une mauvaise image extérieure de sa marque (qui entraîne des difficultés à recruter), et une diminution globales des performances collectives.
Quels moyens pour agir contre le harcèlement sexuel au travail ?
Pour lutter contre ces agissements, l’employeur doit avoir 2 types de réponse :
- adopter un protocole strict et ferme en cas de harcèlement sexuel reconnu ;
- augmenter les actions de prévention, pour limiter leur survenue.
Écouter les victimes, sanctionner les harceleurs
Lorsqu’un cas de harcèlement sexuel ou d’agissement sexiste est signalé à la hiérarchie, celle-ci doit mettre en place une cellule d’écoute et de soutien à la ou aux victimes. Avec bienveillance et discrétion, et avec l’appui d’un personnel médical si besoin, il faut recueillir la parole des victimes.
Ensuite, une enquête interne s’impose, dans le plus grand respect des deux parties. Ainsi, une analyse équitable de la situation est faite, afin de ne pas porter atteinte aux personnes impliquées avant d’établir la réalité des faits. Cependant, il est possible que l’enquête soit sue de tous : dans ce cas, le manager ou le DRH peut être chargé d’aménager des espaces de dialogue individuel ou collectif, pour éviter la suspicion et la défiance, dommageables pour les relations de travail.
A l’issue de l’enquête :
- si le harcèlement sexuel n’est pas avéré, il faut éviter de stigmatiser la personne qui a émis le signalement. Sa déclaration laisse entendre qu’elle souffre et a besoin d’une attention particulière qu’il faut chercher à comprendre.
- si les faits sont avérés, il faut protéger la victime de représailles et sanctionner l’employé harceleur (licenciement, changement de postes ou d’horaires…), dans l’optique de faire cesser ses agissements et éviter toute récidive.
Prévenir le harcèlement sexuel au travail
La prévention reste la clé de voûte d’une bonne gestion du harcèlement au travail. En tant que risque psychosocial, le harcèlement sexuel a toute sa place dans le plan de prévention des risques professionnels, obligatoire en entreprise. Le CSE (comité social et économique) peut ainsi être doté de référent harcèlement sexuel, dont le rôle sera de veiller particulièrement à ce risque et aux facteurs de sa survenue, au sein des équipes et de l’organisation générale du travail.
D’autres pistes peuvent être poursuivies :
- développer la coopération et la reconnaissance de chacun, valoriser le collectif dans les succès, et éviter les situations de compétition interindividuelle.
- tendre vers une parité des genres au sein des équipes, à tous les échelons de la hiérarchie, afin de limiter la domination masculine ou féminine.
- valoriser les réussites de chacun, femme et homme, sans distinction.
- appliquer un management humain, qui respecte les configurations familiales de tous.
- combattre l’installation d’une culture virile au sein de l’entreprise
- appliquer une tolérance zéro face aux situations de harcèlement ou agissements sexistes et sexuels.